Chers tous,
Tout d’abord nous voulions Sacha et moi vous remercier pour votre fidélité, vos feedbacks aussi. Alors que l’on s’approche de la barre des 800 abonnés — avec un joli taux d’ouverture de +60% — nous avons décidé d’accroître encore l’explosivité de Dimanche Seven : 4 articles et une synthèse un peu plus courte. Mais l’actualité n’en n’est pas moins riche. A partir de janvier, vous recevrez donc également une newsletter le mercredi (a priori nous mettrons en avant 3 articles).
Alors que l’année touche à sa fin et que comme nous le lisions sur une Story Instagram “Avoiding catching Covid in the next 10 days before Christmas is the new Squid Games”, nous vous souhaitons des fêtes très joyeuses — et l’on se réécrira d’ici là.
Amitiés,
Grégory & Sacha
PS : n’hésitez pas à partager D7 à vos entourages — c’est ainsi que nous bâtirons une belle communauté ;)
Cy Twombly, “Apollo”
👥 Great Protocol Politics (Foreign Policy, Dec. 11, 2021)
Par Parag Khanna et Balaji S. Srinivasan
Dans un article de novembre 2021, l’excellent politologue américain Ian Bremmer postule que l’avènement des Big Tech Companies va bouleverser l’ordre du monde. Leur souveraineté sur le digital space ne saurait être contrée par les Etats, dont l’influence déclinerait.
Stephen Walt lui répond que la guerre de Troie n’aura pas lieu : les Etats sont là et bien là ; ils ne disparaîtront pas ; ils sont capables de reprendre le dessus sur les Big Tech soit par la régulation (à l’exemple du bras de fer engagé entre Amazon et la nouvelle présidente de la commission américaine de régulation, Lina Khan), soit par des mesures discrétionnaires (comme en Chine par exemple).
Dans cette tribune de Foreign Policy, Parag Khanna et Balaji S. Srinivasan tracent une voie intermédiaire : l’avenir n’appartient ni aux Etats, ni aux Big Tech, mais à internet en général. Ainsi, les tendances les plus disruptives sont les crypto-monnaies, dont le contrôle échappe à ce stade tant aux Etats (malgré le projet d’une crypto-monnaie chinoise, la DCEP) qu’aux entreprises (Libra, la crypto-monnaie de Facebook, semble encore très loin du compte).
De ce constat, les deux auteurs dérivent dix tendances clé. Parmi elles : la rule of law devient complémentaire de la rule of code (ainsi, la blockchain garantit la propriété intellectuelle partout) ; les régulateurs les plus puissants ne sont plus les Etats mais les applications (Uber a un contrôle extensif sur l’activité de ses chauffeurs), etc.
☮️ Israeli Leader Holds Historic Meeting With Emirati Crown Prince (New York Times, Dec. 13, 2021)
Par Patrick Kingsley
Le Premier Ministre israélien Naftali Bennett a rencontré lundi dernier le Prince héritier des Emirats Arabes Unis, Mohamed Ben Zayed (a.k.a. MBZ - dont on parle régulièrement dans D7).
Et dans le monde des relations internationales cela ressemble quand même beaucoup à une révolution au Moyen-Orient et cela est extrêmement réjouissant.
C’est la première visite officielle israélienne aux Emirats Arabes Unis ; elle est consécutive aux accords d’ Abraham de l’été 2020, qui ont également normalisé les relations avec le Maroc, le Soudan, et Bahreïn.
Les principales thématiques abordées furent économiques.
“The joint statement released after the meeting said the leaders had discussed trade, economic, climate, and food security issues, among others, and had pledged to establish a joint Emirati-Israeli research and development fund, as well as a joint business council. It did not say whether they had discussed Iran, and an Israeli official who attended the meeting declined to comment on what regional geopolitical issues were mentioned.
The official said that the Israeli-Palestinian conflict was not discussed, and that the two leaders instead spoke at length about establishing a free-trade agreement.”
Naftali Bennett et MBZ
🚘 Inside Tesla as Elon Musk Pushed an Unflinching Vision for Self-Driving Cars (New York Times, Dec. 6, 2021)
Par Cade Metz et Neal Boudette
Dans ce reportage du Times, Cade Metz et Neal Boudette rapportent, sur la base de témoignages d’anciens employés, qu’Elon Musk pourrait avoir mis en péril le bon développement du projet de voiture autonome de Tesla en voulant imposer sa vision par dessus tout.
De manière générale, Tesla repose sur la promesse de représenter “le futur de la conduite” (c’est le slogan sur le site de la marque). S’agissant de la voiture autonome, Elon Musk (nommé person of the year 2021 par le Time Magazine) était convaincu :
(1) qu’elle pourrait être radicalement autonome (au point que le conducteur “pourrait jouer aux jeux vidéos pendant son trajet) ;
(2) que cette autonomie pourrait reposer exclusivement sur un réseau de caméras embarquées, à l’exclusion d’autres capteurs.
En pratique, la fonction Autopilot est très décriée pour avoir conduit à des accidents. Les régulateurs mettent en cause les éléments de langage de Musk, qui exagéreraient le degré de sophistication de l’Autopilot et mèneraient certains conducteurs à ne plus se concentrer du tout sur la route - et donc à des accidents.
L’usage de caméras semble par ailleurs insuffisant. De manière générale, il est à craindre qu’une voiture parfaitement autonome n’existe jamais.
“For several years, Autopilot incorporated radar, and for a time Tesla worked on developing its own radar technology. But three people who worked on the project said Mr. Musk had repeatedly told members of the Autopilot team that humans could drive with only two eyes and that this meant cars should be able to drive with cameras alone.
But recently, even Mr. Musk has expressed some doubts about Tesla’s technology. After repeatedly describing Full Self Driving in speeches, in interviews and on social media as a system on the verge of full autonomy, Mr. Musk in August called it “not great.””
♟️ How Magnus Carlsen won chess back from the machines (The Guardian, Dec. 13, 2021)
Présenté par Michael Safi avec Bryan Armen Graham
On en avait parlé dans un D7 précédent : le championnat du monde d’échecs a opposé le champion en titre Magnus Carlsen, norvégien, au challenger russe Ian Nepomniachtchi.
“Après deux parties nulles, Carlsen et Nepo (ainsi qu’il est généralement appelé) sont à égalité. Leur duel donne à voir une opposition de styles classique et paroxystique : le norvégien est un stratège, d’une psychologie robotique et qui écrase progressivement son adversaire ; le russe est un feu-follet, souvent pris d’angoisse, adepte de tactiques créatives mais risquées.”
Carlsen a écrasé Nepo. Au delà de leur duel, cette victoire est aussi celle de l’humain contre la machine. Depuis une vingtaine d’années, les matchs nuls se sont multipliés dans les échecs de haut-niveau en conséquence de la préparation chirurgicale des joueurs, qui s’appuient sur l’analyse d’ordinateurs.
Mais Carlsen a su faire des choix stratégiques courageux et typiquement humains, qui ne reposaient pas tant sur le calcul de longues séquences de coups (les “variantes”) que sur son intuition et son jugement. Parallèlement, Nepo, paralysé par l’enjeu, a abandonné son ardeur créative habituelle et n’est jamais parvenu à poser de problèmes à son adversaire.
C’est la victoire d’une approche focalisée sur le jeu et la prise de risque, et la défaite d’une préparation trop défensive et confiée aux ordinateurs.