Chers tous,
Cette semaine une version courte de D7, avec un premier article qui met en exergue un nouveau concept, celui de dragons (les startups valorisées plus de 12 milliards de dollars). Car cela semble tout à fait pertinent et car cela nous fait patienter en attendant la suite de Game of Thrones.
Bonne fin de semaine à tous, amicalement,
Grégory & Sacha
© Mark Bradford — “Disappear Like a Dope Fiend” (2006).
🐉 Why the startup world needs to ditch "unicorns" for "dragons" (Axios ProRata, 310821)
Par Dan Primack
*** Nota bene : un article d’août (c’était il y a 100 ans !) mais très intéressant. Les dragons sont-ils les nouvelles licornes ? ***
La notion de licorne est née en 2013 pour décrire les 39 entreprises américaines de logiciel valorisées plus d’un milliard de dollars et fut amendée en 2015 par deux journalistes pour décrire n’importe quelle startup ayant atteint ce chiffre au fil des levées. On comptait alors 80 “licornes” - et le caractère mythique de l’animal symbolisait leur rareté.
Aujourd’hui, il y en a 800, avec une valorisation cumulative de 2,6 trillions de dollars - ce n’est plus très impressionnant. Alors il faut un nouvel animal mythique : et pourquoi pas le dragon ?
Ce club réunirait les startups valorisées à plus de 12 milliards de dollars. Vu sous cet angle, il y en aurait aujourd’hui 19 dont 9 aux US, parmi lesquelles Stripe, SpaceX, et Instacart (dirigé par la française Fidji Simo).
♣️ The Post-Pandemic Office Should Be a Clubhouse (Wall Street Journal, 060122)
Par Nitin Nohria
Classiquement, l’objet du lieu de travail était de permettre aux travailleurs de travailler en centralisant et mettant à leur disposition les outils de travail - une perspective qui a volé en éclat avec le télétravail, la pandémie, etc.
Il appartient désormais au lieu de travail non plus de permettre de travailler mais au contraire de faire tout ce qui ne relève pas exactement du travail (en tous cas de son versant strictement productif) : intégrer les recrues ; développer les relations entre collègues ; générer des idées et trancher des débats par le dialogue.
Cette distinction entre hard work et soft work nous vient du journaliste Derek Thompson et semble particulièrement opérante.
Pour ce faire, Nitin Nohria propose de transformer les bureaux en clubhouses - des espaces essentiellement collectifs, qui favorisent les discussions plutôt que le travail solitaire. Dans un contexte où 60% des bureaux modifient leur architecture à la suite du Covid, cette réflexion pourrait prendre un tour très concret et créer des opportunités de marché.
⚽ The Florida Financiers Buying Up Europe’s Football Teams (Bloomberg, 130122)
Par David Hellier
Des investisseurs américains rachètent tout ou partie de clubs de football européens. John Textor, qui est déjà propriétaire de Crystal Palace à travers son fonds Eagle, vient de racheter 80% du club de Molenbeek et 90% du légendaire club brésilien de Botafogo (contre 330 millions de dollars).
L’objet de cet investissement est de créer un “groupe multiclub” susceptible de générer des synergies (via des infrastructures communes, des partenariats de formation, des prêts de joueurs d’un club à l’autre…).
Il existe aujourd’hui 60 groupes multiclubs, dont les deux tiers ont émergé depuis 2018.
Le risque est que certains de ces clubs soient vidés de leur âme et deviennent des clubs satellites, qui ne visent qu’à faire briller le club principal en formant des joueurs pour lui et en les lui transmettant.
🙈 The Bored Ape NFT craze is all about ego and money, not art (The Guardian, 040122)
Par Jonathan Jones
Jonathan Jones tourne en dérision l’acquisition du NFT du Bored Ape #79 par Eminem pour 450K$ - et, à travers elle, l’existence même des NFT dans le monde de l’art.
Les NFT incarnaient initialement une forme de reprise en main des artistes sur leurs créations : ils fournissaient une preuve d’authenticité formelle et dédié à l’espace digital, et on a vite vu fleurir de belles histoires - tel artiste longtemps ignoré avait amassé plusieurs millions grâce aux NFT, etc.
On assiste désormais à une reprise en main de la reprise en main par les acteurs historiques du marché de l’art (Christies a vendu un fichier JPEG pour 69 millions de dollars au printemps dernier).
Le phénomène des Bored Apes fait voler en éclat ce qui restait de romantisme dans l’idée : ce ne sont pas des oeuvres d’art, mais des dessins très ordinaires produits en série à la va-vite dans le cadre d’une stratégie marketing plus large et assez cynique. Les détenteurs de ces NFT font partie d’un Bored Apes Yachting Club - qui est essentiellement un club de célébrités incluant le rappeur Post Malone ou le présentateur Jimmy Fallon, dont la simple présence assure la renommée et la bonne dynamique de l’actif.
A la limite, l’inflation aberrante de la valeur des Bored Apes pourrait être la véritable oeuvre d’art - il s’agirait d’une démonstration par l’absurde de la vanité des NFT.